La Mercedes SLK 350 : Le Cab' se rebiffeSource : Essai, Textes et Photos réalisés par Mathieu Bellisario Sport-Prestigele 10 septembre 2008Après avoir répudié le SLK 200 K, gourmand et paresseux, Sport-Prestige ne pouvait supporter de vivre plus longtemps dans le pêché. Transgressant les dogmes, la rédaction a accordé sa grâce à Mercedes. Qui se rachète une conduite. Sa bonne foi recouvrée, le constructeur nous a laissé, clé en main, goûter à la tentation d’une sportive sans auréole, le SLK 350. Un ticket d’entrée pour le paradis, ultime sapement avant les joies aphrodisiaques du 55 AMG.
Restyler, ou l’art de s’époumoner à grand vent afin de faire plier les consciences tatillonnes. Dans le consortium des labels automobiles, Mercedes n’est pas constructeur à agir sans prévenir. Tel un arbre pensant, ce bon vieux centenaire entretient ses sorties avec ce qu’il faut de communication, même rigide et sans effort. Preuve en est avec le SLK. Depuis l’automne 1996, et sa première apparition sur tout ce que le globe compte de lacets bitumés, le roadster allemand a définitivement inscrit le toit en dur dans l’inconscient collectif. Si bien qu’une capote, même en toile cirée sans grumeau, ne donne le change qu’avec déraison. N’en déplaise au Z4 3.0si et autre Boxster S. Sans appel, Mercedes a pris les devants et détient depuis le gros du marché -environ 40 %- sur le segment du coupé-cabriolet. Envié et enviable.
Deux générations de SLK plus tard, et pas loin du demi-million en termes de vente, la relève s’annonce compliquée. Mercedes, il est vrai, n’ayant pas les atouts d’un chef de bagatelle. La pointe du museau humide, l’étoile ne s’autorise cette fois qu’un coup de plumeau passé du bout des doigts, de peur d’écorcher au vif sa gamme sans toit, ni loi. Quatre versions au total, qui manquent malgré tout d’homogénéité, à commencer par la plus juvénile d’entre elles, baptisée 200 K (lire notre essai). Besoin de répondant ? Pour l’obtenir, il faut s’adresser à plus mature. Le 55 AMG battant en retraite, reste à prendre ses marques à bord du 350 Sport…
Design : ange ou démon ?Est-ce parce qu’il n’apprécie guère de se faire retoucher sans permission, toujours est-il que le SLK 350 deuxième génération a peu changé depuis 2004. Sa dernière évolution en date. Tant mieux. Son dessin sauvage et racé n’a que peu de rivaux. En clair, les principales mesures de ce restylage tendent à le rendre un chouia plus bagarreur (oui, mais jusqu’où ?), notamment au niveau de la face avant, musculeuse, avec un nez taillé en pointe. L’héritage F1. Outre des contours de calandre marqués avec soin, et quelques menus détails, principalement le fait des projecteurs (antibrouillards cerclés de chrome, feux arrière foncés), . A l’arrière, soucieux de gagner en respectabilité, le SLK 350 déploie une double sortie d’échappement rectangulaire (trapézoïdale), ainsi qu’un remodelage de son pare-choc.
Plus attendri que rafraîchi, le biplace étoilé garde malgré tout la forme. Ses formes. Et qui peut aujourd’hui avancer qu’il ne tient pas la distance ? Personne. Un athlète au galbe sculpté, sans apport artificiel. Encore que. Vêtu d’un pack sport, le roadster hausse le ton : jantes alliage 18 pouces six doubles branches, pneus 225/40 R 18 à l’avant et 245/35 R 18 à l’arrière, déflecteur AMG sur le couvercle de coffre… Méchanceté pas gratuite : 2 500 euros sur facture. Démoniaque.
Moteur : le souffle coupéPositionné au centre de la gamme, le SLK 350 enterre, et de loin, le molletonné 200 K, premier de cordée. Mais supporte-t-il la comparaison avec le maître V8 du 55 AMG ? Exclusif six cylindres de 3498 cm3, le bloc Sport Engine du 350 a reçu toute l’attention des ingénieurs de Mercedes, qui lui ont octroyé un rabiot de puissance et de couple (360 Nm). Des données vérifiées illico : 305 ch (contre 272 auparavant) et une propension évidente à monter haut dans les tours (jusqu’à 7200 tr/min). A de tels niveaux, la symphonie métallique qui s’évade de la poupe n’en devient que plus gutturale. Stridente, rocailleuse. Et ce, quel que soit le mode activé (Sport/Confort). Tendez l’oreille…
Souligné d'un trait de lipstick écarlate, le V6 germanique
A l’écoute : un V6 monté sur ses grands chevauxSombre au démarrage, la sonorité du V6 3,5 litres change de tessiture une fois poussée dans ses retranchements. Quelques octaves grattées à chaque pression de la pédale des gaz. Oubliez Figaro le noceur, réduit ici au rang de piètre buffo de basse-cour. Amadeus amadoué. Dès lors, les sympathiques surchauffes nasales à l’orée des 100 km/h franchis, tout cela en 5,4 secondes, ne font qu’égayer un peu plus la conduite. De vrais relents de sportivité dont il faut, hélas, payer le prix à la pompe. En effet, la réduction de consommation promise par le constructeur (9,5 litres en cycle mixte) s’annonce purement et simplement fausse. 11,8 litres constatés. 17,4 litres avalés en poussant un peu. Beaucoup. Passionnément.
Sur la route : destination plaisirDe la passion, il en est aussi question dès les premiers hectomètres. Doté d’un châssis confortable et efficace, le SLK 350 se dirige d’une main de velours. Deux, par mesure de sûreté. Une accessibilité de conduite forte aisée, qui renvoie aux écuries la direction floue du 200 K. Nouvelle et paramétrique ici. Résultat : rapidité et aisance en courbe, constance dans le comportement. De quoi se laisser aller… Avouons-le : quel délice de cruiser tête nue, le long de parois couvertes, et de sentir au creux de son pavillon les vibrations hurlantes portées par le vent. La mécanique du corps : j’accélère, je décélère… Immuable. Rappel à l’ordre. Les multiples aides à la conduite (dont le fameux ESP), qui remplissent leur tâche sans en faire trop, incitent à la prudence. Intrusives mais au combien précieuses, d’autant que l’Allemande laisse son train arrière filer plus qu’il ne faut. Sans complexe. Peut-être l’usure des pneumatiques, constatée lors de l’essai, a-t-elle joué en sa défaveur…
Dotée d’une boîte automatique à sept rapports 7G Tronic, le roadster prend son pied. Grosse pointure. Nerveuse comme il se doit, la transmission enclenche les vitesses sans coup férir. A l’attaque, toujours. Dommage que l’absence de palettes de commande au volant (disponible en option) engourdisse des membres avant déjà frustrés par la BVA. D’où vient le mal cette fois-ci ? Des suspensions, fermes, ce qui pour la catégorie s’avère tout bonnement honnête, mais dont l’épreuve d’une route accidentée se digère avec difficulté. Secousses à bord… Alors, on en pince pour le SLK 350 Sport ? Qu’il serait agréable d’en dire autant des disques de frein, trop souvent pris par l’idée de rentrer leurs muscles à l’approche d’une vitesse incorrecte. Ne parlons pas des 250 km/h, champ des possibles bridé électroniquement. Et moralement. Rapport au « souci » de freinage, une pression ferme du bout des orteils et tout s’arrête. Au propre comme au figuré.
C'est un aller simple pour des sensations extrêmes qui vous attend à bord du 350 Sport. Tout le monde en croque : apprentis comme pilotes chevronnés. Gare à ne pas se laisser griser...
Vie à bord : roadster d’accueilPourtant à l’aise dans son siècle, le SLK 350 retourne en enfance dès que l’on évoque les travaux finis. Pas entièrement en l’espèce. Trop classique, l’habitacle manque de personnalité. Ce qui n’implique pas pour autant un défaut de qualité : plastiques solides au toucher granuleux, renforts parfaitement moussés au devant de la planche de bord… Un assemblage correctement effectué, mais qui aurait mérité une attention autre. A l’œil, le tableau de bord et ses compte-tours passent l’épreuve de l’ergonomie stylée, ce qui n’est pas le cas du volant à trois branches, au dessin grossier et aux comodos mal agencés (fichu ESP…). D’autant plus regrettable que la sellerie en cuir surpiquée de points rouges assure un maintien appréciable, qui ne saurait être perturbé par la position de conduite : basse, presque allongée et donc, résolument sportive. Ceux désirant retrouver une assise plus conventionnelle n’auront qu’à redresser leur siège via les commandes électriques.
Il n’empêche. Une fois installé, difficile de ne pas se sentir en sécurité. Les six airbags invités à bord n’y sont pour rien. Ou si peu. Surtout, la technologie développée par Mercedes n’induit, en aucun cas, un besoin imminent de quitter cette coquille protectrice. Qu’il s’agisse du système de chauffage de nuque (Airscarf), des rétroviseurs qui s’inclinent dès la marche arrière enclenchée, ou de l’anti-reflet plaqué d’office sur chaque surface translucide, l’argument confort se pose là. C’est simple, le futur semble déjà proche. Tout proche. Plus que parfait. Retour au présent avec la seule anicroche entrevue : le système de navigation à l’écran non tactile (doublé d’une sono plate) souffre d’une interface vieillotte. Il serait temps d’y remédier.
Cerise sur le Strudel, le SLK 350 reste un roadster premium. Comment l’oublier. A peine 22 secondes suffisent pour que le coupé se mue en cabriolet, dans un silence de cathédrale. Une manœuvre possible uniquement à l’arrêt (ou à très basse vitesse), le doigt maintenu sur la commande située aux abords du frein à main. Plié en quatre, le toit respecte l’hospitalité accordée par son hôte coffre, lequel conserve ainsi une contenance appréciable (de 208 à 300 litres). Surtout quand, à quelques encablures de là, le faible nombre de rangements n’invite guère à l’imagination. Cinq espaces creux en tout.
Dans la jungle des constructeurs d'outre-Rhin, Mercedes et Audi se livrent une bataille de chiffonniers. Mais trop souvent, l'étoile pâlit face aux anneaux, en partie à cause d'une finition loin du standing affiché. Chose que le SLK 350 ne démentira pas...
Conclusion : s’il n’en reste qu’un…Ce sera celui-là. Evidemment. Sans échapper aux reproches, bien légitimes, le SLK 350 mérite à tous égards la distinction du coupé-cabriolet le plus performant du marché. Polyvalent avec ça. Mais qu’importe. Assez joueur pour se faire plaisir, cajolé en surface mais aussi dans ses moindres ourlets, le SLK dispose d’autant d’atouts qui font de lui la nouvelle valeur étalon d’une gamme dominatrice sur son segment. Après, son attractivité relative (49 900 euros), alourdie par une masse d’options ruineuses, l’empêche de se montrer avenant à qui veut lui plaire. Tout a un prix.
MERCEDES SLK 350 (2008 -Prix : 49 900 euros Prix du modèle essayé : 64 750€
LES PLUS +
* Gueule d’ange au sourire carnassier
* Agrément de conduite
* V6, chef de choral
* Direction soignée de sa myopie
* Toit en dur escamotable
* Confort intact
* Ingéniosités technologiques (Airscarf, rétroviseurs anti-reflets…) LES MOINS -
* Peu d’évolution
* Pas encore une sportive accomplie
* Manque de mordant au freinage
* L’ESP déconnecté, capricieuse du train arrière
* Habitacle sans cachet
* Déficit de rangements
* GPS obsolète
* Ribambelle d’options coûteusesSource : Essai, Textes et Photos réalisés par Mathieu Bellisario Sport-Prestige